1. Priscilla
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Q: Comment vous sentez-vous actuelement?
P: Pour le moment je me sens merveilleusement bien.
Il m’est arrivé plein de choses chouettes ces derniers temps.
J’ai parlé de ma transition à des amis et un jour, voilà qu’ils
m’invitent pour une petite fête. Quand je suis arrivée, il y avait
plein d’amis qui étaient là avec leurs enfants.
Ils avaient organisé une fête pour ma transition! J’ai reçu beaucoup
de cadeaux, des boucles d’oreilles, des colliers, des bas…
et le lendemain, une amie qui s’était déplacée de Paris, rien que
pour ça, est venue faire du shopping avec moi pour acheter des fringues.
C’était formidable!
Ma transition est toute récente; enfin le fait que je commence à sortir
en femme, c’est tout récent.
Avant, je m’habillais en femme à la maison. Quand je rentrais, j’enlevais
vite mon pantalon, mes trucs de mec et je mettais une robe ou une jupe.
Cela m’ennuyait parce que lorsque je me rendais compte que j’avais oublié
d’acheter quelque chose, du beurre par exemple, il fallait que je me rehabille
en mec pour sortir l’acheter.
J’ai une compagne depuis 12 ans qui n’aime pas beaucoup que je m’habille en
femme. Quand je lui ai dit que j’aimais m’habiller en femme, elle m’a dit
qu’heureusement qu’on n’habitait pas ensemble parce que sinon, ce ne serait
pas possible! Mais maintenant, cela vient de changer.
Je sortais déjà « en femme » sauf pour aller chez mon père et ma compagne.
Q: Durant la transition, vous avez pris des hormones?
P. Non, rien encore. Je me suis dit que j’allais vivre un an en femme
pour voir si c’était vraiment ce que je voulais et qu’au bout d’un an je
déciderais si j’allais plus loin.
Je vais sans doute me faire épiler pour l’été. En été, des bas, ça ne va
pas et je suis trés poilue. Par contre, j’ai un dilemme parce que, par
solidarité avec ma fille qui est très poilue aussi, je ne devrais pas le
faire. Si moi, je m’épile, je vais lui donner un message comme quoi les
filles doivent être épilées.
Q: Comment vous voyez-vous vieillir?
P: Et bien, j’ai beaucoup de mal à me voir vieillir. J’ai 60 ans maintenant,
j’accepte mes chevaux blancs et tout ça, ce n’est vraiment pas un problème.
Mais le fait de devoir prendre toutes sortes de médicaments, ça c’est trop.
Mon père, lui, a 90 ans et les pilules qu’il prend ne tiennent même pas dans
une cuillère a soupe.
Q: Vous vous voyez dans une home ou une résidence-services?
P: Pour une résidence-services, je n’aurais pas les moyens. Cela va devenir
de plus en plus cher. Est-ce que je me vois dans un home? Oui, peut-être
bien! Si cela existe encore quand j’aurai l’âge. Ma compagne dit qu’elle
ne veut pas aller dans un home du CPAS parce que c’est mal fréquenté.
Moi, je ne suis pas comme cela. Je pense qu’on peut toujours communiquer,
découvrir des choses, de la poésie… Peut-être qu’un cadre, genre ancien
directeur-général de la banque truc-muche, ne vas pas apprécier.
Pour lui, la poésie, c’est quand le taux d’interêt est superieur à 4%!
Q: votre compagne a le même âge que vous?
P: Oui, elle a un an de plus, elle a 61 ans. Jusqu’à présent, il y avait
un tas de choses qui nous empêchaient de vivre ensemble, entre autres
le fait que chez elle, je ne pouvais pas porter de robes. Maintenant,
c’est résolu depuis le week-end dernier mais je ne peux vraiment porter
de robes à l’extérieur parce qu’elle a peur du qu’en dira-t-on et là,
je m’habille en femme. Et je me dis que forcément, il y a des commérages.
On voudrait vivre ensemble, toutes les deux, mais c’est compliqué.
Peut-être que la solution serait de déménager toutes les deux.
Mais j’adore la ville, j’adore Schaerbeek. D’un autre côté, j’aime bien
Herbeumont aussi, c’est au milieu de la forêt et j’aime bien être avec
elle dans son village…